Le contenu d’une lettre d’intention portant sur l’acquisition d’une entreprise
La lettre d’intention est un outil crée de la pratique, qui a fini par trouver sa place dans le code civil. Elle est un engagement de faire ou de ne pas faire ayant pour objet le soutien apporté à un débiteur dans l’exécution de son obligation envers son créancier (article 2322 du code civil). Ainsi, elle est beaucoup utilisée pour garantir l’engagement d’un débiteur envers son créancier. C’est par exemple le cas d’une société-mère qui va s’engager à tout faire pour garantir l’exécution des obligations de sa filiale envers son créancier.
La lettre d’intention est une sûreté, et ne doit donc pas être confondue avec une condition suspensive de contrat par exemple. Elle engage celui qui l’écrit en une obligation de moyen puisqu’il doit faire tout son possible et mettre tous les moyens possibles en œuvre pour que le contenu de la lettre se réalise, mais le garant ne s’engage en aucun cas à payer à la place du débiteur. Elle peut être utilisée pour des opérations de cessions/reprises d’entreprises, et de même, en aucun cas elle n’oblige un futur repreneur à la reprise de l’entreprise, elle fixe seulement les termes de la négociation, et constitue une protection lorsque des informations confidentielles sont en jeu. Son contenu va être décisif quant à l’engagement de son auteur. Elle ne doit pas non plus être utilisée à n’importe quel moment des négociations : elle permet en effet de définir le cadre et les limites de la négociation.
Points abordés dans cet article
Le contexte de la rédaction d’une lettre d’intention
Quand la rédiger
Dans la mesure où elle permet de poser le cadre et les limites des opérations de négociation en matière de cession d’entreprises, elle devra être utilisée généralement assez tôt, en amont de l’opération, dès que l’acheteur potentiel se sera fait une idée du projet et qu’il voudra lancer des opérations d’audits afin de parfaire son analyse.
Elle peut aussi être rédigée à la demande d’un vendeur qui souhaite que l’acheteur potentiel mette par écrit ses intentions, notamment lorsque des informations confidentielles sont en jeu. Dans ce cas, il est aussi possible de recourir à un accord de confidentialité, protégeant les parties notamment dès lors que les informations comptables de la société sont transmises.
Les clauses et éléments clés à adapter selon le besoin
Concernant la forme, le format est libre : la lettre d’intention peut être rédigée sur papier libre, l’essentiel étant d’y mettre le bon contenu selon le contexte et l’engagement voulu.
Elle doit permettre d’identifier :
- Le ou les acquéreurs, rédacteurs de la lettre ;
- La société objet de l’acquisition, et notamment ses caractéristiques essentielles (domaine d’activité, filiales éventuelles, chiffre d’affaires, clientèle, brevets, équipements industriels, etc.) ;
- Le nombre de parts sociales ou d’actions objet de l’acquisition ;
- Si la vente fera l’objet d’une condition suspensive ; c’est-à-dire si l’acquéreur aura recours à un prêt pour financer l’acquisition.
- Un calendrier détaillant les opérations de négociations (périodes d’audit et d’émission de l’offre, phase de négociation, réalisation de l’opération).
- Une clause de non-concurrence, ce qui dépend beaucoup du type d’activité exercée et du contexte de l’acquisition. Par exemple, elle ne sera pas utile s’il s’agit d’une cession pour cause de départ à la retraite du vendeur.
- Une clause de garantie d’actif et de passif : la clause de garantie d’actif vise à protéger l’acquéreur contre toute diminution des actifs ayant une origine antérieure à la cession.
L’intérêt de la cumuler avec une clause de garantie de passif est de pouvoir protéger l’acquéreur contre les baisses d’actifs et les hausses de passifs ayant une origine antérieure à la cession.
- Une clause d’exclusivité, de façon à garantir la cession à l’auteur de la lettre d’intention : cette clause permet au vendeur de ne négocier qu’avec l’auteur de la lettre d’intention pendant une période déterminée.
- Une clause confidentialité dès lors que le cédant communique des informations financières et commerciales (fichier client, bénéfices, santé de l’entreprise).
Les principaux risques à éviter dans la rédaction d’une lettre d’intention
Une rupture abusive des négociations
Comme évoqué, le principal intérêt d’une lettre d’intention portant sur l’acquisition d’une entreprise est d’encadrer les négociations.
Pour l’acquéreur, le risque juridique n’est pas forcément le plus important en pratique, c’est plutôt celui de ne pas savoir s’arrêter à temps et de s’engager dans une promesse de cession de fonds de commerce qui ne correspondrait pas à son projet.
Ensuite, une lettre d’intention de l’acquéreur permettra de protéger le cédant, d’une part par rapport à la confidentialité des informations transmises, et d’autre part, par rapport à la portée de l’engagement du repreneur ; d’où l’importance du contenu de la lettre sur ce dernier point.
Le principal risque à éviter lorsque l’on prépare une lettre d’intention portant sur la reprise d’une entreprise, c’est bien une rupture abusive des négociations. Même s’il arrive assez rarement en pratique, cela reste important de s’en protéger en faisant attention au contenu de la lettre. Si l’une ou l’autre des parties estime que l’autre n’a pas négocié de bonne foi, elle peut intenter une action en justice pour récupérer des dommages et intérêts en indemnisation du préjudice subi.
L’évaluation des préjudices encourus en cas de rupture abusive
La lettre d’intention engage son auteur d’une obligation de moyen envers le vendeur. Ainsi, le vendeur pourra engager la responsabilité contractuelle de l’acquéreur s’il prouve que ce dernier n’a effectivement pas mis tous les moyens possibles en œuvre pour parvenir aux engagements définis dans la lettre.
Les préjudices susceptibles d’être indemnisés dans ce cas sont :
- La perte de chance de conclure une promesse de cession de fonds de commerce : elle s’évalue au regard des éléments définis dans la lettre d’intention. Il faut que l’une des parties ait perdu une chance et ait cru valablement pouvoir conclure un contrat.
- Un préjudice moral : Cela peut être le cas par exemple d’une atteinte portée à la réputation commerciale de l’entreprise, si l’acquéreur ne respecte pas une clause de confidentialité et se sert d’informations confidentielles contre le cédant.
- Les dommages matériels qui recouvrent le montant des frais de procédure engagés par une partie.
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