La décision de fusion : quelles procédure et formalités ?

Par Ines Belkheiri, le 19 juillet 2021 — 9 minutes de lecture
Fusion société

Après la réalisation du projet de fusion, d’autres étapes sont réalisées afin de compléter le processus d’union de deux sociétés. Après l’étape du contrôle de la fusion, il est également obligatoire de procéder à des formalités de publicité pour que la fusion soit bien valable juridiquement.

Les suites de l’élaboration du projet de fusion

Le contrôle du projet de fusion

Le cas classique : la nomination d’un ou plusieurs commissaires à la fusion

La nomination du commissaire à la fusion

Afin de surveiller certains éléments importants de la procédure de fusion, telles que la fixation de la parité d’échange ou le contrôle du respect des intérêts des parties en présence, le législateur a prévu la possibilité de nommer un ou plusieurs commissaires à la fusion. L’article L. 236-10 du Code de commerce le prévoit pour les SPA et l’article L. 236-23 du Code de commerce le prévoit pour les SARL. Ce commissaire à la fusion est par principe désigné par décision judiciaire, rendue sur requête des dirigeants des deux sociétés qui sont engagées dans le processus de fusion. Le commissaire à la fusion est soumis aux mêmes incompatibilités que les commissaires aux comptes s’agissant de leur désignation, et il va accomplir sa mission de la même façon que les commissaires aux apports.

La mission du commissaire à la fusion

La mission du commissaire à la fusion est assez vaste. Elle se traduit notamment par l’établissement de deux rapports :

  • Un rapport sur les modalités de la fusion. Son objectif est de vérifier que les valeurs correspondant aux deux sociétés impliquées dans l’opération de fusion sont bien fidèles à la réalité et également que le rapport d’échange est équitable. Pour procéder à cette vérification, le commissaire à la fusion va demander aux différentes sociétés la communication de tous les documents utiles.
  • Un rapport sur la valeur des apports en nature. Dans ce rapport, le commissaire à la fusion évalue les différents actifs qui sont intégrés dans la transmission universelle du patrimoine, les éventuels avantages particuliers, et vérifie que l’actif net est conforme à la réalité en plus d’être au moins égal au montant de l’augmentation de capital engendré chez l’absorbante.

Ces deux rapports sont ensuite mis à la disposition des associés, au siège social, au moins 30 jours avant la date de l’AGE qui se prononce sur l’opération de fusion.

L’exception : l’absence de commissaire à la fusion

Par exception, le site juridique-assistance.fr précise que l’intervention d’un commissaire à la fusion peut être écartée, notamment dans deux cas.

Le refus en présence d’une unanimité des actionnaires

L’article L. 236-10 II du Code de commerce prévoit cette possibilité lorsque les actionnaires des sociétés participant à l’opération ont décidé à l’unanimité de ne pas désigner de commissaire à la fusion. Cependant, en vertu de l’article L.236-10 III du Code de commerce, même si l’intervention d’un commissaire à la fusion est facultative, il faut désigner un commissaire aux apports si des biens en nature sont transférés dans le cadre d’apports en nature au cours de l’opération de fusion.

Le refus en raison d’une fusion simplifiée

Le refus d’intervention de commissaire aux comptes en raison d’une fusion simplifiée recouvre deux hypothèses :

  • La fusion-absorption d’une filiale qui est détenue à 100 % par l’absorbante (prévue par l’article L. 236-11 du Code de commerce). Dans ce schéma, les actionnaires sont les mêmes et il n’y a pas d’actionnaire minoritaire. Or, l’intervention du commissaire à la fusion et les décisions prises en assemblée générale visent souvent à protéger les actionnaires minoritaires. Donc il est logique que la procédure de fusion soit simplifiée. La simplification correspond à l’absence d’approbation de la fusion par l’AGE au sein de l’absorbée (seule une décision sera prise au sein de l’absorbante) ainsi qu’à l’absence d’établissement d’un rapport par le commissaire à la fusion, ou par le ou les dirigeants.
  • La fusion-absorption d’une filiale détenue à 90 % (prévue par l’article L. 236-11-1 du Code de commerce) dont le régime juridique est similaire au précédent. Cette fusion a été créée par le droit européen en 2012.

Le site www.avocatdroitadministratif.fr précise que des dérogations, régies par l’article L. 236-11-1 2° du Code de commerce, ont néanmoins été créées pour nommer un commissaire afin de protéger les 10% minoritaires.

Enfin, il existe un autre moyen, appelé dissolution-confusion, prévu à l’article 1844-5 alinéa 3 du Code civil, qui entre en concurrence avec la fusion classique dans le cas où l’on possède une société à 100%. La dissolution-confusion permet ainsi de procéder à la dissolution sans liquidation avec transmission universelle du patrimoine lorsqu’une société détient toutes les parts d’une autre société. La seule décision qui sera prise est l’acte de dissolution. Le plus souvent, la dissolution-confusion est préférée car elle est plus simple et moins chère.

Les formalités de publicité du projet de fusion

Le projet de fusion doit, quelle que soit la forme de la société, faire l’objet de formalités de publicité. Le projet de fusion doit en effet faire l’objet d’un dépôt aux greffes du TC du siège des sociétés en cause et également d’un avis de fusion inséré au BODACC. Concernant cet avis de fusion, l’article R. 236-2-1 du Code de commerce prévoit qu’il est possible de publier cet avis sur le site Internet de la société au lieu de passer par le BODACC. Ces formalités doivent être accomplies 30 jours au moins avant la date de l’AG qui est appelée à statuer sur la décision.

La décision de fusion

Que ce soit pour la fusion, l’apport partiel d’actif ou la scission, le site notaires21.fr ajoute qu’il est obligatoire d’adopter des résolutions au sein de chacune des sociétés participantes à l’opération. Ces résolutions, une fois adoptées, doivent faire l’objet de publicité.

Les résolutions

Le scénario classique

Toutes les SPA doivent mettre à disposition des actionnaires au siège social, 30 jours avant l’assemblée, les différents éléments, notamment le traité de fusion et les rapports du ou des commissaires à la fusion. La décision de fusion se réalise au sein de chacune des sociétés engagées dans le processus de fusion et dans les conditions qui sont requises pour la modification des statuts d’après l’article L. 236-2 du Code de commerce. Les AGE se prononcent sauf dans le cas des fusions simplifiées, comme vu précédemment.

Les scénarios divergents

Une fusion approuvée dans des conditions différentes de celles prévues dans le projet de fusion

Une interrogation a été soulevée lorsque la fusion était approuvée dans des conditions différentes de celles prévues dans le projet de fusion. Dans un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 6 octobre 2015 (Cass., civ., Ch. Com., 6 octobre 2015, 14-11.680), la Cour a considéré que les AGE pouvaient, sans porter atteinte au pouvoir des organes dirigeants, approuver la fusion après en avoir modifié les conditions, notamment pour tenir compte des observations du commissaire à la fusion. 

Une fusion approuvée dans des conditions différentes de celles portées à la connaissance des associés

Une interrogation a également été soulevée lorsque la fusion était approuvée dans des conditions différentes de celles portées à la connaissance des associés. Même si on est sur une majorité renforcée pour l’AGE, on considère que la majorité qui doit être suivie doit être plus forte encore, c’est à dire qu’on requiert l’unanimité dans le cas où la société absorbante qui va accueillir les associés de l’absorbée serait une société à risque illimitée alors que la société absorbée serait à risque limitée. Enfin, pour une transformation vers une SAS (société absorbante), en raison de toutes ses caractéristiques, l’unanimité est également exigée.

La publicité de la fusion

L’inscription au RCS

Après que la décision de la fusion a été prise, chacune des sociétés doit procéder à l’inscription modificative auprès des RCS respectifs. Pour la société absorbante, il y a nécessairement modification des statuts car il y a une augmentation de capital. Pour la société absorbée, il y a publicité de la dissolution. Ces formalités doivent être faites dans un délai d’un mois suivant la décision décidant de la fusion par l’AGE. L’opération de fusion devient opposable aux tiers à partir de cette réalisation. 

La déclaration de conformité

Il faut de plus réaliser le dépôt d’une déclaration de conformité prévue à l’article L. 236-6 du Code de commerce, qui doit relater toutes les opérations qui ont été réalisées dans le cadre de la fusion, et dans laquelle les sociétés affirment que l’opération a été réalisée en conformité avec les lois et les règlements. Le greffier se charge de la vérification. Cette déclaration doit être réalisée dans les 2 mois suivants l’opération, à peine de nullité de l’opération, en vertu de l’article L. 236-6 du Code de commerce.

Cette déclaration, auparavant générale pour les sociétés commerciales, ne s’applique désormais qu’aux seules sociétés européennes, aux fusions transfrontalières, aux SA et aux autres SPA. Pour les SARL ou SNC, il n’y a plus de déclaration de conformité.

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