Complément et ajustement de prix dans les opérations de revente d’entreprise
Les clauses de compléments de prix, aussi appelées « earn out » sont de plus en en plus fréquentes ces dernières années dans les opérations de cession d’entreprises. Elles permettent au cédant, qui ne fait plus partie de la société (le « out ») et n’en a donc plus le contrôle, de continuer à profiter des performances (le « earn »). L’objectif est même plus large en ce qu’il peut consister à indexer une partie du prix de cession sur les résultats futurs de la société cible.
Du fait de leurs objectifs, ces clauses obéissent à un régime complexe en matière juridique et fiscal. Le contexte de leur utilisation sera déterminant pour la rédaction de la clause.
Points abordés dans cet article
Le régime juridique des clauses d’« earn-out » dans les opérations de revente d’entreprises
Le contexte de rédaction déterminant le contenu de la clause
La mise en place de cette clause trouve son origine lors de la négociation de cession d’actions ou de parts sociales : en cherchant un accord sur la valorisation de l’entreprise et donc du prix de cession des parts, les parties peuvent avoir un point de vue différent, et la clause peut permettre de rétablir cet équilibre. En effet, le cédant peut être tenté d’intégrer les résultats potentiels de la société dans le prix, alors que l’acquéreur ne les connait pas encore. Cette clause pourra permettre à l’acquéreur de faire bénéficier le cédant d’un complément de prix de cession si les résultats qu’il avait envisagés vont effectivement se réaliser au cours des exercices comptables postérieurs à la cession.
Ainsi la durée conseillée d’application de la clause est une période de 24 à 36 mois après la cession.
Les effets de la clause
Par l’effet de cette clause, le cessionnaire va se rassurer en s’acquittant d’une partie du prix en fonction de la performance de l’entreprise sur une période déterminée librement, et le cédant pourra conserver un intérêt à la bonne gestion de l’entreprise.
Cette clause peut aussi être utilisée comme un outil de négociation lorsque la réussite de l’opération de cession dépend de la personne du cédant qui se doit de rester responsable de la direction de l’entreprise pendant la période de passation de pouvoirs. L’objectif de cette clause, et notamment en conservant une présence du cédant, est de faciliter la passation de pouvoir au profit du repreneur.
En revanche, l’inconvénient majeur de cette clause est que le complément du prix de cession ne pourra être en aucune manière acquis, garanti et certain, à la différence d’une simple clause d’indexation qui dépend du bénéfice de la société ou de son chiffre d’affaires.
Le régime fiscal des compléments de prix
Champ d’application
Fiscalement, le complément de prix reçu par le cédant en exécution d’une clause d’earn out est imposable sur le fondement de l’article 150-0 A du CGI au titre de l’année au cours de laquelle il est reçu.
C’est par exemple le cas lorsque le complément de prix est indexé sur le chiffre d’affaires de la société dont les titres sont l’objet de la cession.
Le complément de prix peut être déterminé en fonction d’une indexation en relation, soit avec l’activité d’une filiale de la société, soit avec l’activité du groupe auquel appartient la société dont les titres sont cédés.
Dans le cas d’un complément de prix qui peut être plafonné, il doit présenter un caractère aléatoire à la date de la cession de telle sorte qu’il ne soit prévisible de manière certaine ni pour le cédant, ni pour le cessionnaire.
Dans le cas où la clause pourrait prévoir la présence du cédant dans l’entreprise pour une durée déterminée, s’il est établi que le complément de prix constitue la rémunération de l’activité du cédant dans l’entreprise, la clause pourrait être requalifiée totalement ou partiellement dans le cadre de la procédure de répression de l’abus fiscal (article L64 du Livre des procédures fiscales). Le complément de prix sera alors soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu.
Modalités d’imposition
Par principe, le versement d’un complément de prix en application de cette clause va constituer un fait générateur de l’imposition des gains de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux de l’article 150-0 A du CGI.
Le complément de prix reçu par le cédant va constituer un gain net, quelque soit le résultat (plus-value ou moins-value), de la cession dégagée au titre de l’année de transfert de propriété des valeurs mobilières cédées.
Par exemple, en 2020, l’acte de cession de droits sociaux d’un montant de 200 000€ prévoit le versement au jour de la cession d’une somme de 170 000€ correspondant à la partie fixe du prix de cession et un complément de prix indexé sur le bénéfice de la société payable l’année suivante.
Toujours en 2020, la cession dégage une moins-value de 30 000€, imputable sur l’année 2020 et au cours des 10 années suivantes.
En 2021, il est procédé à un versement complémentaire dégageant une plus-value nette du même montant. La moins-value de 30 000€ réalisée en 2020, si elle reste en report, va s’imputer sur cette plus-value.
Enfin, lorsque le complément de prix va prendre la forme de remise de valeurs mobilières ou de droits sociaux, il pourra bénéficier du statut prévu par l’article 150-0 B du CGI.
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