L’élément intentionnel du contrat de société

Par Amanda Marcome, le 18 janvier 2022 — 7 minutes de lecture
élément intentionnel contrat société

Outre les conditions générales classiques comprenant le consentement, la capacité, l’objet et la cause, des conditions spéciales sont imposées par les articles 1832 et suivants du Code civil, conditions sans lesquelles il ne peut y avoir de société.

Il y a trois éléments qui doivent être réunis pour qu’on soit en présence d’un contrat de société :

–       un élément personnel (associés) ;

–       un élément matériel (apports) ;

–       un élément intentionnel.

Concernant l’élément intentionnel, chaque associé doit avoir une double intention :

–       l’intention de participer aux résultats sociaux ;

–       l’intention de participer aux activités sociales.

L’intention de participer aux résultats sociaux

Chaque associé doit accepter de participer non seulement aux résultats positifs mais aussi aux résultats négatifs.

La participation des associés aux résultats positifs

La participation des associés aux résultats positifs correspond en pratique au partage des bénéfices, qui peut se réaliser à deux moments différents.

Premièrement, en cours de vie sociale, les bénéfices sont distribués sous forme de dividendes, qui seront répartis entre les associés à la double condition que :

–       des bénéfices soient réalisés ;

–       et que la société décide de les répartir (la société n’est en effet pas tenue de les répartir, et peut les mettre en réserve si elle le juge opportun).

Par ailleurs, après dissolution de la société, les bénéfices qui auraient éventuellement été mis en réserve peuvent être distribués lors du partage final (boni de liquidation).

La participation des associés aux résultats négatifs

La participation des associés aux résultats négatifs est imposée par l’article 1832 alinéa 2 du Code civil, au terme duquel « les associés s’engagent à contribuer aux pertes ».

La distinction entre contribution aux pertes sociales et l’obligation aux dettes sociales

Il ne faut pas confondre deux notions : la contribution aux pertes sociales et l’obligation aux dettes sociales.

La contribution aux pertes sociales concerne les rapports des associés entre eux. Elle constitue une règle générale applicable dans toutes les sociétés, y compris les sociétés à risque limité, et ne s’exerce en principe qu’après dissolution lors du règlement du compte final. Elle se traduit par les circonstances que les pertes éventuellement subies par la société en cours de vie sociale vont in fine s’imputer sur les droits des associés, qui vont alors être privés en tout ou en partie de la reprise de leurs apports.

L’obligation aux dettes sociales ne concerne que certains associés (ceux qui sont indéfiniment tenus des dettes sociales) et les tiers. Elle vise le droit pour les créanciers de la société de poursuivre le paiement sur le patrimoine personnel des associés. Cette obligation est exclue quand on a affaire aux sociétés à risque limité, elle ne peut exister que dans des sociétés à risque illimité.

Les clauses léonines

La participation aux résultats positifs et négatifs est en principe proportionnelle à la fraction du capital détenu. Néanmoins, il s’agit d’une règle supplétive, c’est-à-dire que les statuts peuvent prévoir une répartition différente, d’après l’article 1844-1 alinéa 1er du Code civil.

Cela étant, il y a une limite à cette faculté des statuts qui est précisément que les statuts ne peuvent pas prévoir une clause léonine. Une telle clause inscrite dans les statuts serait réputée non écrite, d’après l’article 1844-1 alinéa 2 du Code civil.

Au sens premier du terme, la clause léonine est celle qui attribue l’intégralité des bénéfices à un seul des associés (part du lion).

Par extension, la clause léonine concerne également d’autres types de clauses. En effet, il peut s’agir de la clause qui exclut l’un des associés des bénéfices ou qui essaierait de déroger aux participations. Est également considérée comme léonine la clause qui mettrait toutes les pertes à la charge d’un des associés. Serait enfin léonine la clause qui mettrait affranchirait un des associés de toute contribution aux pertes.

La seule catégorie de clause qui a posé problème en pratique est la dernière. Certaines dispositions pourraient exister dans des conventions extérieures aux statuts, dans le cadre de promesses unilatérales d’achat de parts ou d’actions consenties pour un prix fixe et invariable pendant toute la durée de l’option. La jurisprudence a évolué sur ce point. Par le passé, la jurisprudence a pu annuler de telles promesses, en considérant qu’elles faisaient échec à la contribution aux pertes. Mais depuis, la jurisprudence est revenue sur cette position en considérant que le fait d’échapper aux pertes n’était pas l’objectif des parties à une telle promesse. En effet, quand de telles promesses sont conclues, c’est généralement soit pour permettre à un investisseur de sortir de la société, soit pour étaler dans le temps la réalisation d’une cession, et non pas dans un dessein léonin, pour faire échapper un associé à la contribution aux pertes. La jurisprudence a donc plutôt tendance à considérer aujourd’hui que de telles promesses sont valables.

L’intention de participer aux activités sociales

C’est ce qu’exprime l’exigence de l’affectio societatis, qui peut se définir comme l’intention de collaborer à l’entreprise commune de manière active et égalitaire.

Cette notion assez floue, se distingue difficilement du consentement au contrat de société, si ce n’est que l’affectio societatis est une intention de collaborer tout au long de la vie de la société, contrairement au consentement qui traduit la volonté de collaborer à la constitution de la société. 

L’affectio societatis est d’autant plus insaisissable qu’il est variable d’une société à une autre. Il est facile à vérifier dans une petite société, alors que dans les très grosses sociétés, notamment dans celles qui pratiquent l’offre au public, l’affectio societatis devient très évanescent. En effet, dans le cas de grosses sociétés, l’associé peut être simplement celui qui a voulu faire un placement.

Pourtant, bien que ce soit une notion floue et parfois inconsistante, cet affectio societatis est néanmoins nécessaire en ce sens que c’est lui qui va permettre la qualification d’une société. Dans le cas des sociétés créées de fait, la cohabitation des concubins ne suffit pas à qualifier une société créée de fait, il faut prouver une implication.

Plus rarement, l’absence d’affectio societatis pourra être relevée par le juge pour reconnaître le caractère fictif d’une société. Les juges pourront alors décider que la coquille de société n’est que trompeuse et détruire cette apparence en prononçant la nullité de la société.

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