La situation individuelle de l’associé

Par Amanda Marcome, le 28 janvier 2022, mis à jour le 25 janvier 2022 — 10 minutes de lecture
qualité d'associe droits obligations

Cet article traite de la permanence de la qualité d’associé ainsi que des conséquences qui découlent de cette qualité d’associé.

La permanence de la qualité d’associé

En principe, quand on est associé, on le demeure. Le caractère permanent se comprend si on se rappelle que cette qualité d’associé résulte d’un contrat, par lequel a été constituée la société. Le contrat en question ne peut disparaitre qu’avec le consentement unanime de tous, d’après l’article 1134 du Code civil. Appliqué au contrat de société, ce texte implique que le contrat de société ne prend fin que par décision unanime de tous les associés.

De là découle l’idée qu’un associé ne peut ni être exclu ni se retirer unilatéralement de la société.

Cette solution est néanmoins extrêmement contraignante, ce qui explique qu’elle subisse des atténuations, atténuations sur les deux aspects, tant sur l’exclusion éventuelle d’un associé que sur le retrait d’un associé.

L’exclusion d’un associé

L’exclusion d’un associé est en principe impossible, mais il y a des exceptions.

D’une part, une éventuelle exclusion légale dans certaines circonstances est très rare. On la rencontre notamment dans les sociétés anonymes à titre de sanction de l’inexécution de libération des apports.

Quant à l’éventualité d’une exclusion conventionnelle, résultant d’une clause d’exclusion insérée dans les statuts, de telles clauses sont parfois expressément autorisées par la loi. Tel est le cas dans les sociétés par actions simplifiées, où l’article L.227-16 du Code de commerce prévoit cette possibilité si elle est explicitée dans les statuts. Il en est de même dans les sociétés à capital variable, d’après l’article L.231-6 du Code de commerce.

Dans le silence de la loi, la validité de ces clauses est douteuse mais est pourtant admise par la jurisprudence sous trois conditions :

–       Il faut que la clause précise les causes et les modalités de l’exclusion ;

–       Il faut que la clause respecte les droits de la défense (principe du contradictoire) ; et

–       Il faut que la clause ait prévu une indemnisation (il faut qu’on indemnise l’associé de la valeur des droits sociaux dont on le prive en l’excluant).

Il reste une autre possibilité d’exclusion, l’exclusion judiciaire. Une telle exclusion est en principe impossible, sauf cas très particulier. L’article 1844-12 du Code civil prévoit un seul cas, celui où une action en nullité de la société est engagée sur le fondement de l’incapacité ou d’un vice du consentement ayant affecté un associé, l’article prévoit une exclusion de l’associé en question.

Le retrait d’un associé

Le retrait d’un associé est l’hypothèse dans laquelle un associé se retire unilatéralement de la société en contraignant ses coassociés ou la société elle-même au rachat de ses droits sociaux. En principe, un tel retrait est impossible.

En revanche, trouver un acquéreur qui accepte de lui reprendre ses droits sociaux et de prendre sa place dans la société est en principe possible même si cela est problématique lorsque la société a un fort intuitu personæ.

Il existe des exceptions où le retrait est possible. Dans les sociétés à capital variable, (article L.231-6 du Code de commerce) ou dans les sociétés civiles (article 1869 du Code civil), un associé peut imposer le rachat de ses parts sociales sans même avoir, au préalable, présenté un acquéreur (un repreneur) qui aurait été refusé par les autres associés.

Les conséquences découlant de la qualité d’associé

L’associé a principalement des droits, mais aussi des obligations.

Les droits des associés

Ils sont très variables d’une société à l’autre selon le type de société. Nous développerons les règles communes à toutes les sociétés. 

Le socle commun de droit tient à la circonstance qu’il y a toujours deux grandes catégories de droit qui leur sont dévolus : des droits politiques et des droits pécuniaires.

Les droits politiques des associés

Les droits politiques sont ceux qui confèrent un pouvoir sur la marche des affaires sociales, pouvoir qui se traduit notamment par :

–       le droit de vote, qui est essentiel ;

–       le droit à l’information, qui est le droit d’être informé par les dirigeants quant à la marche des affaires sociales. Ce droit est très réglementé, et la réglementation varie selon le type de société dans lequel on se trouve. Concernant les modalités de ce droit d’information, des sanctions communes sont prévues, à savoir la possibilité de demander en référé soit la condamnation des dirigeants à communiquer les informations sous astreinte, soit la désignation d’un mandataire chargé de procéder à la communication.

–       dans certaines circonstances exceptionnelles, un associé peut avoir un droit de défendre en justice l’intérêt social. C’est ce qui se rencontre en cas d’abus de majorité. Parfois même un associé peut ainsi agir en représentant la société. C’est l’hypothèse désignée par l’action ut singuli.

Les droits pécuniaires des associés

Les droits pécuniaires permettent à l’associé de tirer profit de sa qualité d’associé. Ces droits pécuniaires se traduisent par :

–       un droit sur les bénéfices : ce droit porte sur les bénéfices distribués au titre des dividendes qui vont être répartis entre les associés, et sur les bénéfices qui n’auraient pas été distribués, qu’ils aient été mis en réserve ou qu’ils apparaîtraient dans le boni de liquidation au moment de la liquidation de la société.

–       un droit sur les parts  sociales ou actions : l’associé a un droit sur les parts sociales ou les actions qu’il détient. C’est l’idée selon laquelle les droits sociaux sont considérés comme des biens ayant une valeur patrimoniale et donc susceptibles d’être vendus, donnés ou d’être confiés en garantie (nantis). Les règles entourant le droit sur les parts sociales ou actions sont très variables suivant le type de société.

Il y a néanmoins un problème commun qui se pose à propos de ces parts sociales ou actions. La difficulté est celle de l’évaluation des droits sociaux, dans la mesure où cette évaluation est souvent délicate à effectuer puisque la valeur des droits sociaux dépend de la situation de la société.

La solution est donnée par l’article 1843-4 du Code civil. Il résulte de cet article qu’en principe, la valeur des droits sociaux est fixée par l’accord des parties. A défaut, elle sera déterminée par un expert normalement désigné en principe par l’accord des parties ou à défaut par le Président du tribunal statuant sous la forme des référés.

S’agissant du domaine des expertises, une modification récente a été opérée par une ordonnance de 2014. Jusqu’alors, le domaine de l’expertise était très étendu au regard de la jurisprudence qui s’était développée. L’ordonnance du 31 juillet 2014 est alors venue limiter le domaine de l’expertise à deux cas :

o   Les cas où la loi renvoie à cet article 1843-4 du Code civil. Tel est notamment le cas où un associé a présenté un acquéreur pour ses parts sociales et que cet acquéreur n’a pas reçu l’agrément des autres associés, ou en cas d’exclusion d’un héritier.

o   Les hypothèses où les statuts prévoient la cession ou le rachat des droits sociaux, mais sans avoir prévu la détermination de leur valeur.

Par ailleurs, il est important de noter que le terme d’expert est impropre, en ce sens que l’expert n’est pas un expert véritable mais plutôt un tiers-estimateur, qui est chargé d’évaluer les droits sociaux en tant que représentant des parties. Jusqu’à l’ordonnance de 2014, ce tiers-estimateur pouvait évaluer totalement librement la valeur des droits sociaux, selon les critères qu’il jugeait opportuns, sans être nécessairement tenu de suivre les éventuelles prescriptions des statuts (Cass. com., 3 mai 2012, n°11-12.717, Cass. com, 15 janv. 2013, n°12-11.666). L’ordonnance de 2014 a modifié les choses, puisque désormais le texte prévoit que le tiers-estimateur est tenu d’appliquer les règles de détermination qui auraient été prévues par les statuts. L’estimation que le tiers va réaliser a un caractère définitif, et ne peut être remise en cause qu’en cas d’erreur grossière. Cela étant, la responsabilité du tiers-estimateur pourra néanmoins le cas échéant être engagée par les parties sur le fondement d’une faute quelconque.

Les obligations des associés

Les associés ont diverses obligations. On peut songer à les songer, selon que ce sont des obligations pécuniaires ou personnelles.

Les obligations pécuniaires

Les obligations pécuniaires des associés sont assez rares. Dans toutes les sociétés, il y a une obligation de libération des apports. Pour le reste, cela dépend si la société est à risque limité ou illimité. Dans les sociétés à risque illimité, les associés seront personnellement tenus des dettes sociales.

Les obligations personnelles

Quant aux obligations personnelles, elles sont en principe absentes. La seule obligation personnelle qui puisse être envisagée est l’éventualité d’une obligation de non-concurrence. A cet égard, on retrouve le principe énoncé, à savoir qu’en principe il n’y a pas d’obligation de non-concurrence. En effet, la seule qualité d’associé n’interdit pas l’exercice d’une activité concurrence, mais il existe des exceptions diverses.

Il existe une exception légale, à savoir que celui qui effectue un apport en industrie est tenu d’une obligation de non-concurrence, de même que celui qui fait un apport en fonds de commerce.

Il existe également une possibilité d’obligation de non-concurrence d’origine conventionnelle, à savoir que les statuts peuvent très bien prévoir une clause de non-concurrence pesant sur les associés.

En principe, ces obligations sont intangibles, ou du moins elles ne peuvent pas être augmentées en cours de vie sociale, sauf avec le consentement unanime des associés. C’est ce qui résulte de l’article 1836 alinéa 2 du Code civil. C’est une règle générale qui vaut pour toutes les sociétés et pour toutes les obligations. Par exemple, s’il s’agit de l’insertion d’une clause de non-concurrence, il faut l’unanimité des associés.

Un avocat spécialisé en droit des sociétés vous recontacte

Nous vous mettons en contact avec un avocat expert dans le domaine du droit des sociétés. Les avocats de notre réseau s'engagent à vous rappeler rapidement.

    📧 E-mail *

    📞 Téléphone *

    Amanda Marcome

    Commentaires

    Laisser un commentaire

    Votre commentaire sera révisé par les administrateurs si besoin.